Un arrêté* ministériel, paru le 17 août, interdit désormais la commercialisation d’ivoire brut et de corne non travaillée en France, tant dans les salles de vente aux enchères que via Internet. Cette interdiction concerne toutes les espèces d’éléphants et de rhinocéros. Mais elle n’est pas totale, car des dérogations exceptionnelles sont accordées pour les objets sculptés antérieurs au 1er juillet 1975, date d’entrée en vigueur de la Cites**. L’interdiction épargne ainsi le marché des antiquités, qui devrait rester florissant. L’arrêté, soumis à la consultation publique entre le 7 juin et le 7 juillet, a recueilli 2 551 avis en un mois, témoignant d’une forte mobilisation sociétale.
Certes, le commerce et l’utilisation commerciale de l’ivoire brut, quelle que soit son ancienneté, sont dorénavant prohibés dans l’Hexagone. Fin janvier 2015, la France avait déjà fait un premier pas, en cessant de délivrer des certificats d’exportation pour l’ivoire à l’état brut, à l’instar de l’Allemagne, de la Suède et du Royaume-Uni. Le nouvel arrêté interdit également, « sur tout le territoire national et en tout temps, le transport à des fins commerciales, le colportage, l’utilisation commerciale, la mise en vente, la vente ou l’achat de défenses et d’objets composés, en tout ou partie, d’ivoire des espèces d’éléphants ou de corne de rhinocéros ». Enfin, l’interdiction s’étend à la fabrication d’objets en ivoire, ainsi qu’à la restauration et à la vente de ceux réalisés depuis juillet 1975.
En parallèle, le commerce et la restauration des objets sculptés entre le 1er avril 1947 et le 1er juillet 1975 sont strictement réglementés : le certificat d’exportation européen reste exigé pour les pièces travaillées datant de cette période. Mais ces certificats intra-communautaires, même délivrés au cas par cas, sont parfois falsifiés par les trafiquants pour alimenter en ivoire de contrebande les pays demandeurs, en particulier la Chine. En outre, comment dater précisément et vérifier, en pratique, l’ancienneté de l’objet en ivoire ou en corne mis en vente, s’interroge notamment l’Ifaw.
Quatre fois plus d’ivoire issu du braconnage ces dernières années, et les populations d’éléphants d’Afrique centrale réduites de moitié en dix ans… le constat dressé par les ONG demeure très alarmant. Au rythme de 25 000 à 30 000 éléphants tués chaque année, il ne reste plus que quelque 500 000 individus sur le continent africain, soit moitié moins qu’au début des années 1980. Le braconnage des rhinocéros, quant à lui, a augmenté de 9 300 % en Afrique du Sud entre 2007 et 2014. « La survie des populations actuelles d’éléphants dépend de notre capacité à fermer tous les marchés d’ivoire existants », estime l’Ifaw.
** Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.