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Immunité croisée : du lait de vache pour lutter contre la Covid-19 ?

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Immunité croisée : du lait de vache pour lutter contre la Covid-19 ?

Le Sars-CoV-2 possède de nombreux points communs avec les autres coronavirus de la même famille, au point qu’une immunité croisée serait possible. Les chercheurs veulent évaluer le potentiel curatif d’anticorps dirigés contre un coronavirus bovin à l’encontre du virus pandémique. Facilement produits à faible coût, ils pourraient être consommés sous la forme de lait de vache immunisée.

 

Après deux ans de pandémie de Covid-19, les solutions pour traiter cette maladie restent maigres. Comme pour de nombreuses infections virales, il n’existe toujours pas de traitement spécifique efficace contre le coronavirus Sars-CoV-2. Pour limiter les cas graves, il devient urgent de trouver des mécanismes et des stratégies immunitaires et pharmacologiques pour contrôler la maladie. Les vaccins qui construisent une défense immunitaire préventive ont montré leur efficacité et certains anticorps sont déjà utilisés pour neutraliser le virus. Des chercheurs proposent désormais de s’appuyer sur une immunité croisée transmise par du lait de vache immunisé.

Le Sars-CoV-2 est un coronavirus, mais il est loin d’être le seul. De nombreux autres infectent le monde animal, et notamment le BCoV, un coronavirus bovin qui provoque des diarrhées et des gastro-entérites chez les jeunes veaux non immunisés, avec de possibles complications respiratoires. En raison de leur importance économique, médicale et épidémiologique, différents vaccins commerciaux contre le BCoV (y compris les virus vivants et inactivés) sont actuellement disponibles et ont montré un très bon effet protecteur. Il serait donc relativement facile et bon marché d’obtenir du lait immunisé dans les plus brefs délais et en grande quantité. En effet, les immunoglobulines G bovines sont fonctionnellement actives dans tout le tractus gastro-intestinal et peuvent prévenir les infections des voies digestives et respiratoires chez l’homme.

Le Sars-CoV-2 et le BCoV sont des ß-coronavirus phylogénétiquement très proches qui conservent des caractéristiques communes. Structurellement, le BCoV est enveloppé de cinq protéines structurelles, dont quatre sont identiques avec le Sars-CoV-2 : la glycoprotéine de pointe (S), la protéine d’enveloppe (E), la protéine membranaire (M), la protéine nucléocapside (N) et l’hémagglutinine-estérase (HE). Parmi ces protéines en commun, on retrouve notamment la protéine spike S. C’est cette même protéine, largement exposée à la surface virale, qui provoque une réponse immunitaire contre le virus et qui constitue une structure immunodominante contre laquelle sont dirigés les vaccins développés jusqu’à maintenant.

Différentes études démontrent que cette similarité entre les virus est à l’origine d’une immunité croisée puisqu’ils conservent ces épitopes partagés. L’évolution de la cinétique des anticorps après une infection naturelle semble être très proche entre le BCoV et le Sars-CoV-2. En effet, plusieurs classes d’anticorps (IgA, IgM, IgG) sont produites et dirigées contre les différentes protéines structurelles du virus. La présence d’immunoglobulines spécifiques dans la lumière intestinale permettrait alors de contrôler l’excrétion virale. Les chercheurs proposent donc de s’appuyer sur l’immunité passive hétérologue au BCoV, induite par du lait de vache immunisé, pour conduire une thérapie immunostimulante et contrôler ainsi l’infection par le Sars-CoV-2. Le lait de vache entier contient en effet plus de 30 g/l de protéines, dont près de 1 g/l d’immunoglobulines. Ces anticorps dans le lait bovin survivent à l’exposition gastrique et résistent à la digestion protéolytique dans l’estomac et l’intestin. Ainsi, le lait maternel confère une immunité passive qui a un effet protecteur remarquable contre la plupart des maladies infectieuses animales et a été bien étudiée pour presque tous les coronavirus d’intérêt vétérinaire. La présence d’anticorps spécifiques au Sars-CoV-2 a également été trouvée dans le lait maternel humain.

En toute logique, du lait de vache immunisé contre le BCoV devrait permettre d’activer le système immunitaire intestinal contre le virus, et par la même occasion de provoquer une immunité croisée vis-à-vis du Sars-CoV-2, grâce à une reconnaissance antigénique de certaines structures en commun, hautement conservées, notamment les protéines M et S. Des anticorps anti-BCoV présents dans le lait entraîneraient une inactivation totale ou partielle du Sars-CoV-2, agissant un peu comme un vaccin et aidant la réponse immunitaire spécifique.

La complexité du réseau de cytokines chez l’homme rend l’immunomodulation essentielle dans le contrôle de la forme sévère de la Covid-19 et pourrait être obtenue par la présence d’immunoglobulines spécifiques dans le tissu lymphoïde associé à l’intestin et dans la lumière intestinale. Compte tenu de ces phénomènes, les chercheurs souhaitent pousser les recherches sur l’exploration de l’efficacité du lait immunisé et d’autres composés immunitaires (dérivés du lait, jaune d’œuf, etc.) dans le contrôle de la maladie chez les patients humains.

 

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