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Biodiversité : un panorama mitigé de la santé des habitats et des espèces en Europe

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Biodiversité : un panorama mitigé de la santé des habitats et des espèces en Europe

Bruxelles a adopté un nouveau rapport*, « L’état de conservation de la nature dans l’Union européenne », qui se veut le tableau le plus exhaustif à ce jour. Ce bilan va alimenter l’examen à mi-parcours de la stratégie européenne en faveur de la biodiversité. Selon ses conclusions, les mesures ciblées de conservation ont porté leurs fruits, même s’il reste beaucoup à faire pour relever le défi d’un réel changement.

 

Tous les six ans, les États membres présentent un rapport sur l’état de conservation des espèces et des types d’habitats protégés au titre des directives européennes “Oiseaux” et “Habitats”. Ces deux outils législatifs visent à assurer la conservation et l’utilisation durable de la nature dans l’Union, notamment via le réseau Natura 2000 qui regroupe les zones de grande valeur en termes de diversité biologique. Les deux directives jouent dans ce cadre un rôle stratégique pour atteindre l’objectif phare de l’Union : « Enrayer la perte de biodiversité et la dégradation des services écosystémiques d’ici à 2020 » et « assurer leur rétablissement dans la mesure du possible ».

Natura-2000Le nouveau rapport, qui porte sur la période 2007-2012, résulte de la plus vaste collecte de données jamais organisée dans les États membres. Pour la première fois, les directives “Oiseaux” et “Habitats” aboutissent à une évaluation conjointe qui, si elle offre une vue d’ensemble mitigée, démontre toutefois que les mesures prises pour régénérer les écosystèmes fragiles donnent de bons résultats. Il reste malgré tout de nombreux défis à relever, dont dépendent la santé de la nature, elle-même liée à celle de la population européenne, ainsi qu’à son économie.

Pour permettre une comparaison pertinente entre les pays, l’Europe a été divisée en neuf régions biogéographiques terrestres et cinq régions biogéographiques marines qui présentent des conditions écologiques similaires. Les espèces et les habitats marins demeurent les moins connus et leur suivi exigera des efforts supplémentaires conséquents. Un renforcement de la cohérence, dans le cadre de la directive “Stratégie pour le milieu marin”, devrait cependant améliorer la situation.
En plus des informations communiquées par les États membres, les données ont été agrégées et évaluées au niveau biogéographique de l’Union par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) et son Centre thématique européen sur la diversité biologique.

 

Les oiseaux en majorité tirés d’affaire

AlouetteDu côté des oiseaux, les auteurs concluent que 52 % des espèces sauvages évaluées (environ 450) sont « hors de danger ». Néanmoins, environ 17 % demeurent menacées, tandis que 15 % sont « quasi menacées, en déclin ou décimées », comme l’alouette (Alauda arvensis) ou encore la barge à queue noire (Limosa limosa). Pour les populations d’oiseaux des espèces qui ne sont pas hors de danger, les tendances à court terme indiquent que seulement 4 % sont « précaires en progression », alors que 6 % sont « précaires stables » et 20 % « précaires en déclin ».
Dans les écosystèmes marins, 61 % des espèces d’oiseaux sont « hors de danger ». Environ un quart d’entre elles sont menacées, mettant en évidence l’incidence de la prédation et la perturbation dans les colonies, les prises liées à la pêche, et la pollution marine.

 

Plus de 1 200 autres espèces évaluées

Parmi les autres espèces d’intérêt communautaire, protégées par la directive “Habitats”, 23 % ont bénéficié d’une évaluation « favorable ». Toutefois, l’état de conservation de 60 % des espèces est encore jugé « défavorable » (« défavorable insuffisant » dans 42 % des cas et « défavorable médiocre » pour 18 %). L’état de ces espèces dans les prairies, les zones humides et les dunes est particulièrement préoccupant. De nombreuses espèces associées aux habitats d’eau douce, comme les poissons migrateurs, enregistrent en outre un déclin inquiétant.
Du côté des tendances observées, sur les 60 % d’espèces dont l’état de conservation est « défavorable », 4 % sont « défavorables en amélioration », 20 % « défavorables stables » et 22 % « défavorables en dégradation ».

 

231 types d’habitats naturels

Dans l’ensemble, l’état de conservation des habitats est moins satisfaisant et évolue moins bien que celui des espèces. Ainsi, l’état de la plupart des habitats est jugé « défavorable » (« défavorable insuffisant » dans 47 % des cas et « défavorable médiocre » pour 30 %), avec seulement 16 % qui bénéficient d’une évaluation « favorable ».

Les principales menaces recensées pour les habitats sont liées à certaines pratiques agricoles (le surpâturage, l’abandon des systèmes pastoraux, l’utilisation d’engrais et de pesticides, etc.) et aux modifications des conditions naturelles d’origine anthropique (état des masses d’eau, modification du fonctionnement hydrographique, etc.). Pour les systèmes marins, les menaces signalées sont « l’utilisation des ressources vivantes » (pêche, prélèvements aquatiques, mais aussi aquaculture) et « la pollution ».

 

Un vaste réseau de zones protégées

Composé de zones de protection spéciale (ZPS, directive “Oiseaux”) et de zones spéciales de conservation (ZSC, directive “Habitats”), le réseau Natura 2000 couvre désormais plus de 18 % de la superficie terrestre de l’Union européenne et 4 % de sa superficie marine. Ce réseau contribue à stabiliser les habitats et les espèces dont l’état de conservation est défavorable, notamment lorsque les mesures nécessaires ont été mises en œuvre et bien ciblées.
habitat-humideAinsi, la grue cendrée (Grus grus), dont les aires de reproduction, de repos et d’hivernage bénéficient d’une protection spéciale au titre de Natura 2000, a vu ses effectifs et son aire de répartition augmenter considérablement depuis l’entrée en vigueur de la directive “Oiseaux”, au début des années 80. De même, les populations de pic à dos blanc (Dendrocopos leucotos), tributaires de la présence de vieux arbres, ont augmenté en Finlande grâce à la modification des pratiques de gestion forestière dans les sites Natura 2000.

Au final, l’état de conservation global des espèces et des habitats en Europe apparaît plutôt stable, sans évolution significative sur la période 2007-2012, mais demeure défavorable, voire continue à se dégrader. Des efforts de conservation bien plus soutenus seront donc nécessaires pour atteindre les objectifs de l’Union en faveur de la biodiversité en 2020. Certaines espèces, telles que les poissons d’eau douce, ou habitats, comme les pâturages et les zones humides, suscitent des inquiétudes. Pour inverser la tendance, il faudra s’attaquer aux menaces générées par l’agriculture et l’évolution des conditions hydrologiques, ainsi qu’à la surexploitation et à la pollution des mers.

 

Dans le cadre de Refit, le programme de la Commission pour une réglementation affûtée et performante, un “bilan de qualité” des directives vient d’être lancé en matière de protection de la nature, afin de déterminer si ces textes sont toujours adaptés à leurs objectifs. Le nouveau rapport sur l’état de santé de la nature en Europe devrait contribuer à la réalisation de ce bilan, notamment en ce qui concerne l’efficacité de la législation.

 

* http://ec.europa.eu/environment/nature/pdf/state_of_nature_en.pdf

 

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